Une campagne de lutte contre le gaspillage alimentaire de l’enseigne Intermarché
Le gaspillage alimentaire consiste à jeter de la nourriture qui peut pourtant encore être consommée. Ce problème se produit tout au long de la chaîne d’approvisionnement du produit alimentaire. Cela commence par la production agricole, en passant par les grandes surfaces et les restaurants pour en venir à la consommation propre de l’individu. Le gaspillage alimentaire est donc un véritable problème dans une société de consommation qui pousse toujours à la surproduction, mais qui se traduit en France par 10 millions de tonnes de produits alimentaires jetés par an. Pourtant différents moyens d’action sont mis en place, et cela, d’une façon multiscalaire. En effet, les différents échelons ont un lien entre eux et influent considérablement les uns sur les autres. Les mesures prises ne peuvent arrêter totalement le gaspillage alimentaire, mais envisager de le réduire. Par ailleurs, les échanges sur ce sujet que j’ai pu avoir avec un producteur agricole, un restaurateur et un cantinier et par les témoignages qu’ils m’ont livrés m’ont permis de mieux cerner certains enjeux de ce problème pluridimensionnel et de réfléchir sur comment essayer d’y remédier. Dès lors, quelles solutions peuvent être mises en place pour lutter contre le gaspillage alimentaire?
La production agricole : premier maillon de la chaîne
13,8 % de la production agricole mondiale est jetée avant même d’être vendue selon la FAO, l’agence mondiale pour l’alimentation des Nations unies. Par exemple, des fruits et des légumes qui ne sont pas adaptés aux standards de taille, de couleur ou de forme se voient être abandonnés alors que parfaitement consommables. 22% des fruits et légumes sont ainsi perdus. Il y a également de la surproduction qui ne peut parfois être distribuée totalement et le surplus finit par être inutilisé. Les techniques de stockage doivent donc être améliorées, cela représente certes des investissements pour les grandes entreprises, mais selon la FAO, ils restent nécessaires. Le besoin aussi de former les agriculteurs à des pratiques visant à réduire ce gaspillage, reste un point d’action central.
Cependant, les fermes plus petites ont développé leurs propres moyens pour lutter contre le gaspillage alimentaire. À Mâcon, une commune de la région de Bourgogne, un fermier témoigne de ce qu’il a mis en place localement contre ce problème. Le fermier explique que dans son établissement, il y a deux catégories de produits : ceux qui peuvent être mangés par l’homme et ceux qui ne peuvent pas, mais qui pourront servir à nourrir les animaux aussi élevés dans sa ferme. Il souligne aussi le fait que lorsqu’il y a un pic de production qui fait que tous ses produits ne peuvent être vendus aux consommateurs ou sur le marché, les produits premiers comme les fruits et les légume seront transformés en produit dérivés comme du coulis, de la purée ou de la soupe pouvant aussi être vendus sous cette forme. Il ajoute qu’il entretient un échange avec des associations locales pour pouvoir gérer au mieux la surproduction à laquelle il fait parfois face.
Ce triple levier permet de lutter contre le gaspillage alimentaire avec ce qui est vendu ou consommé, ce qui est transformé ou donné et ce qui permet de nourrir les animaux. Il y a comme un équilibre qui s’établit pour éviter les pertes.
Pourtant, cette solution, d’avoir à la fois un élevage d’animaux et une culture de fruits et de légumes n’est pas une réalité pour la plupart des fermes locales, mais aussi et surtout reste difficilement applicable à plus grande échelle. C’est pourquoi ce fermier souligne qu’il y a le moyen du compost qui peut être adopté ou bien la production de biogaz pour les grands producteurs agricoles. Le biogaz consiste à produire de l’énergie à partir de la fermentation de matières organiques, animales ou végétales. Cela peut être utilisé par exemple, pour le fonctionnement de bus, camions et autres moyens de transport. Le compost quant à lui consiste en un processus biologique qui va permettre la conversion des matières organiques en un produit qui peut être assimilé à du terreau. La plupart des aliments sont tout de même vendus à des commerçants et la question du gaspillage alimentaire prend un autre tournant dans les grandes surfaces.
Des moyens de prévention et une meilleure gestion des produits alimentaires dans les grandes surfaces
Des campagnes de communication des supermarchés ont été réalisées afin de faire de la prévention concernant les fruits et légumes non calibrés, un peu inhabituels pour les standards des consommateurs français. Les enseignes les vendent moins cher et essayent de sensibiliser sur cette question pour montrer qu’en réalité ils sont identiques en goût aux autres fruits et légumes. Nous pouvons voir aussi dans les rayons des supermarchés des confitures, des compotes, des potages où il est clairement indiqué qu’ils sont faits à partir de ces produits déformés, pour éviter qu’ils demeurent totalement inutilisables.
Par ailleurs, concernant les supermarchés, depuis le 1er janvier 2022, ils ne peuvent plus jeter ou détruire les invendus. Ils encourent le cas échéant une amende et des sanctions. Cette loi anti gaspillage permet d’éviter de perdre des produits pourtant consommables. Les supermarchés, s'ils voient que le produit est proche de sa date de péremption, vont pouvoir diminuer le prix de vente de l’aliment pour ses derniers jours restants. Cela est aussi bénéfique pour des personnes dans le besoin qui n’ont pas toujours les moyens de manger aux prix standards des supermarchés. Par ailleurs, depuis 2016, les grandes surfaces de plus de 400m2 doivent collaborer avec des associations d’aide alimentaire pour leur donner leurs invendus. Quant au service de restauration, il a aussi ses défis à relever. Le service de restauration : des mesures de lutte contre le gaspillage alimentaire en fort développement Dans un petit restaurant de Rome, j’ai pu discuter avec un cuisinier et gérant du restaurant qui expliquait comment à sa petite échelle, il avait adopté des mesures pour lutter contre le gaspillage alimentaire, mais pas que ! En effet, les assiettes, les couverts sont faits en plastique compostable issu de matières organiques. Il ajoute que si un repas n’est pas fini, il peut être emballé pour être ramené chez le consommateur à sa demande. Cette pratique se développe de plus en plus dans de nombreux restaurants. Ce restaurateur explique aussi que des organisations caritatives viennent collecter le soir ce qui peut être récupéré. Tout cela, les associations peuvent le donner à des foyers, soit le revendre à prix très bas ou le proposer gratuitement à des personnes dans le besoin, dans le cadre de banques alimentaires ou d’autres moyens d’action. Cependant, après m’avoir fait part de l’engagement de son restaurant, le cuisinier souligne que la lutte passe aussi par la sensibilisation du plus grand nombre. Il cite les réseaux sociaux comme un moyen de communication important qui peut jouer un grand rôle dans le relais d’information et la prise de conscience de ce problème que représente aujourd’hui le gaspillage alimentaire. Des mesures nécessaires à prendre au quotidien De plus en plus, dans les établissements scolaires, un système de tri sélectif est mis en place pour sensibiliser les élèves au recyclage et réfléchir sur la question du gaspillage. Dans un collège parisien, le cantinier en chef explique qu'à son échelle des mesures sont aussi prises. Il va par exemple essayer de gérer le stock de produits à commander pour qu’il y ait le moins de gaspillage déjà au niveau du surplus d’aliments à proposer. Dans la cantine, le personnel a aussi l’autorisation pour certains types de plats de les resservir même s'ils n’ont pas été pris par les élèves la veille. Mais la question centrale demeure pour la lutte contre le gaspillage alimentaire au niveau du quotidien de chaque individu. Les mesures en réalité bien que simples restent souvent négligées. Une liste préétablie avant les courses pour acheter seulement le nécessaire, mais aussi essayer de consommer ces fruits et légumes non parfaits, mais tout aussi bon en sont des exemples. Les applications « anti-gaspi » peuvent être une manière d’agir à notre échelle. Ces applications peuvent faire en sorte de récupérer les invendus du jour proposés par les commerçants partenaires comme par exemple les supermarchés, les restaurants, les traiteurs, les chaînes, etc.. à des prix nettement réduits. Après une géolocalisation, il suffit de passer la commande et de venir chercher ces produits à une heure de collecte déterminée. Cela permet d’agir à double échelle, le client participe à la lutte contre le gaspillage alimentaire en économisant de l’argent tout en sauvant de la nourriture qui aurait pu finir jeter. Plusieurs solutions existent donc pour lutter contre le gaspillage alimentaire, et cela, à tous les niveaux, mais le problème reste de taille. Cependant, comme nous l’avons vu, les moyens d’action sont interdépendants et la participation de chaque maillon de la chaîne est nécessaire pour permettre une meilleure gestion des ressources alimentaires. Chacun doit se sentir concerné et chaque petit geste compte pour lutter contre ce problème aux multiples faces.
Eugénia Dimitrova
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