Depuis son ascension à la tête de l’Etat, Giorgia Meloni insiste sur les valeurs familiales traditionnelles. Au début du mois de mars, son gouvernement a initié de nouvelles actions pour restreindre les droits des familles homoparentales.
La Commission européenne a proposé en décembre 2022 que chaque pays de l’Union soit obligé de reconnaître les droits de filiations déjà accordés dans un autre Etat membre afin de protéger, notamment, les enfants issus de familles homoparentales. Giorgia Meloni, présidente du Conseil des ministres d’Italie a exprimé un avis défavorable quant à cette question. Le parti de la Première ministre a bloqué au Sénat le projet de certificat européen de filiation.
La gestation pour autrui (GPA) et la procréation médicalement assistée (PMA) pour les couples homosexuels sont interdites en Italie mais le gouvernement souhaiterait durcir encore ces règles. Jusqu’à présent, les couples homoparentaux pouvaient y recourir à l’étranger et ensuite faire reconnaître la filiation en Italie mais Meloni voudrait l’interdire.
Des manifestations dans les grandes villes
Dans plusieurs grandes villes d’Italie, des manifestations ont eu lieu pour défendre les droits des familles homoparentales. A Milan, 10 000 personnes se sont rassemblées le 18 mars dernier pour protester contre les décisions gouvernementales. Le maire de la ville, Giuseppe Sala, a dévoilé une lettre reçue du ministère de l’intérieur lui demandant d’arrêter l’enregistrement à l’état civil des naissances d’enfants de couples homosexuels.
Alice Redaelli, présidente d’Arcigay Milano, association de défense des droits LGBTQ+, explique au Monde que « ce tour de vis n’est pas une surprise, car certaines forces politiques au gouvernement ne veulent pas entendre parler des thématiques LGBT ».
Pour l’instant, la justice italienne n’a pas donné de réponse officielle concernant la question de l'adoption, ce qui permet à certains tribunaux de continuer l’enregistrement des naissances par mère porteuse pour des familles homoparentales.
Dérapages et propos provocateurs
De nombreux dérapages ont eu lieu dernièrement dans les médias de la part des membres de la coalition actuellement au pouvoir. Federico Mollicone, député de Fratelli d’Italia a déclaré que “la gestation pour autrui est encore plus grave que la pédophilie”. La première ministre, elle, a expliqué au magazine Grazia que : “Les enfants ont droit au meilleur : un papa et une maman.” De plus, elle a déclaré lors de son élection dire "Oui aux familles naturelles, non au lobby LGBT!".
De l’autre côté, les opposants au gouvernement sont inquiets pour l’avenir de la démocratie italienne. Dolores Bevilacqua et Pietro Lorefice du Mouvement 5 étoiles ont affirmé lors d’une interview à la Repubblica que le règlement européen refusé par Giorgia Meloni "allait simplement reconnaître les mêmes droits aux enfants dans toute l'Europe. Il est décourageant de voir, concluent-ils, comment cette majorité est capable d'instrumentaliser n'importe quoi en passant par-dessus la chair vivante des gens, dans ce cas même des enfants. L'Italie est désormais comme la Pologne et la Hongrie. C'est un mauvais jour pour la démocratie". En effet, pour les membres du parti Mouvement 5 étoiles, il ne s’agit pas là de débattre de la GPA qui reste interdite en Italie, mais de la reconnaissance des droits des enfants.
Alors que l’Italie voit s’affronter deux camps idéologiques et politiques enflammés, certains juristes plaident pour un débat sur le plan juridique avec la création de lois nécessaires au bon fonctionnement de la démocratie.
Saskia Juigner Doubinsky
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