21 courses, 15 monoplaces, 5 équipes, 1 championne. Cette année, une compétition automobile réservée aux femmes a fait une discrète apparition dans l’univers sportif international. Elle vise à faire évoluer l’image et la place de la femme dans le sport mécanique, mais tout ne changera pas du jour au lendemain. Analyse des avancées prévues.
© F1 Academy / Les 5 écuries et 15 pilotes constituant la compétition 100% féminine de 2023
Samedi 21 octobre 2023, pour la première fois depuis sa création, il est possible de suivre en direct la course 1 de la F1 Academy. Créée en début d’année, cette nouvelle compétition 100% féminine a pour ambition de former des pilotes et de leur apporter de la visibilité. Pourtant, il a fallu attendre leur dernier rendez-vous pour pouvoir apprécier complètement les trois courses du week-end. Les épreuves qui ont précédé cette dernière manche pouvaient être suivies par des courts clips diffusés sur les réseaux sociaux. Ce n’est que le lundi suivant qu’un résumé vidéo fut posté sur YouTube, puis sur Canal +. FemalesInMotorsport, des volontaires souhaitant faire reconnaître les femmes dans le sport automobile, s’étonne sur X, anciennement Twitter: “Tant de championnats de F4 sont diffusés en direct alors que d’autres, qui sont pourtant de la F1, ne le sont pas. Comment pouvons-nous inspirer la prochaine génération si on ne peut même pas suivre l’action correctement ?”
Au cœur d’une volonté de faire changer mentalités
La F1 Academy n’est pas la première compétition automobile féminine à souhaiter former des pilotes. Elle s’inscrit après l’arrêt de la W-Series (2019-2022), qui n’a pas pu continuer sa progression, faute de moyens financiers. Cette nouvelle création semble être néanmoins sur la bonne voie. Au départ, l’idée est d’accroître la participation de femmes pilotes dans des compétitions en haut de la pyramide de la monoplace (F3, F2, F1). Pour se faire, il est nécessaire de les préparer au mieux, avec le plus de temps possible sur la piste. La F1 Academy organise alors sept week-ends dans l’année, avec, chacun, deux séances d’essai, une de qualification, et trois courses. Tout cela se fait à bord du modèle Tatuus F4-T421.
Ce championnat fait un autre grand pas par rapport à son prédécesseur : ce sont cinq écuries spécialisées dans les catégories juniors (ART Grand Prix, Campos, Carlin, MP Motorsport, et Prema Racing) qui s’occupent de trois pilotes chacune. Enfin, cette catégorie est soutenue directement par les équipes de Formule 1. Elle est d’ailleurs organisée par Formula One Group.
Une femme bientôt en Formula 1 ?
Bien qu’on puisse l’oublier, la Formule 1 est une compétition mixte. Depuis ses débuts en 1950, seulement deux femmes ont pris le départ d’un Grand Prix. Ces dernières sont Maria Teresa de Filippis et Lella Lombardi. Il faudra probablement quelques années, voire plus, avant d’observer cette donnée monter. À Austin, le week-end du 21-22 octobre, la F1 Academy et la F1 ont concouru sur le même circuit. Cela a permis l’augmentation de la visibilité du championnat, d’autant plus que c’était sa première diffusion en direct. Spectateurs, pilotes, et managers ont pu observer les diverses épreuves. D’ailleurs, Marta García Lopez, pilote espagnole de 23 ans, est devenue la première championne du titre devant eux. A l’arrivée de la course, Lewis Hamilton, septuple champion du monde de Formule 1, l’accueille et la félicite,“You deserve it”, signifiant “Tu le mérites”.
© F1 / La première championne de F1 Academy félicitée par le septuple champion du monde de F1
2024, une année prometteuse ?
L’année prochaine, les sept manches de la compétition seront diffusées, et accompagneront un Grand Prix du Championnat de la discipline-reine du sport automobile. Mais ce n’est pas tout : chacune des dix écuries de la Formule 1 devra choisir une ambassadrice parmi les quinze pilotes de la F1 Academy. Bianca Bustamante, notamment, courra aux couleurs de McLaren. Elle a également annoncé rejoindre leur programme de développement. Enfin, des événements, intitulés “F1 Academy Discover Your Drive”, seront organisés les jours précédant les courses. Des filles âgées de 8 à 18 ans seront invitées à participer à des ateliers afin de les inciter à se lancer dans le monde du sport automobile. Sur un plus long terme, la F1 Academy espère voir les tendances changer, et augmenter le nombre de femmes pilotes.
De belles avancées sont encore à prévoir, mais des limites et des questionnements sont présents. La championne en titre de la F1 Academy ne peut plus participer à cette compétition maintenant qu’elle en a atteint le sommet. L’année prochaine, elle sera en FRECA, le championnat d’Europe de Formule Régionale, avec Prema Racing. Ce baquet (siège) a été entièrement financé par la F1 Academy, Prema Racing, Tatuus et Pirelli. Un accord aurait été d’ailleurs fait entre les deux compétitions pour offrir une quatrième voiture aux meilleures équipes de la FRECA, si elles recrutent une des trois premières pilotes de la compétition féminine. Toutefois, si Marta García ne se place pas en haut du classement de ce championnat mixte l’année prochaine, quelles vont être les réactions ? Cela ne va-t-il pas jouer en la défaveur des volontés d’évolution des mentalités ?
Laurine Lafont
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