Le conflit Israélo-Palestinien fait débat jusqu’à Harvard. Le 8 octobre 2023, des associations étudiantes de Harvard, dans une lettre, ont accusé Israël d’être un « régime d’apartheid » et d’être ainsi « entièrement responsable » des massacres commis par le Hamas. Cette situation a provoqué d’importantes réactions de la part des anciens élèves et donateurs de l’école. Les universités américaines ont des dépenses très importantes et elles se financent en grande partie grâce aux donations. Harvard n’échappe pas à cette règle et est surnommée « l’université milliardaire » grâce à ces nombreux donateurs.
Manifestation à Harvard par les associations qui dénoncent les comportements d’Israël
© JOSEPH PREZIOSO / AFP
Une réaction jugée insuffisante des administrations universitaires
La présidente de Harvard Claudine Gay a été vivement critiqué par certains mécènes de l’université. Ceux-ci jugeaient son silence, après la publication de la lettre, comme une réaction « insuffisamment ferme » face aux violences perpétrées par le Hamas. Quelques jours plus tard, la présidente de Harvard a finalement condamné la lettre. Cependant, des personnalités politique telles que les sénateurs républicains Ted Cruz et Mitt Romney ainsi que l’ancien président de l’université, Lawrence Summers, ont demandé des mesures plus fermes contre l’antisémitisme. Selon eux, l’inaction de l’administration de Harvard mettrait en danger les étudiants juifs. La Maison Blanche a également manifesté son inquiétude face aux actes antisémites qui ne cessent d’augmenter et aux menaces que subissent les pro-palestiniens au sein des universités américaines.
Des donateurs révoltés par les propos des étudiants
Après le 8 octobre, les réactions ont été différentes mais fortes chez les donateurs qui sont souvent à la tête d’entreprises influentes. La première réponse est celle choisie par le milliardaire Bill Ackman (dirigeant du fonds d’investissement Pershing Square Capital Management). Il a demandé à Harvard que les noms des étudiants ayant signé le communiqué soient rendus publics. Il souhaite ainsi éviter de « recruter par inadvertance » le moindre d’entre eux et veut également s’assurer que ses collègues fassent de même. Il justifie ce choix en expliquant : « Embaucheriez-vous quelqu’un qui imputerait aux victimes les violences ignobles d’un groupe terroriste ? Je ne pense pas ». D’autres menacent l’école de suspendre leurs donations. C’est le cas de Leslie Wexner (ancien patron de Victoria’s Secret), Ronald Lauder (président du Congrès juif mondial et héritier d’Ester Lauder) ou enfin Jon Hunstman (ancien ambassadeur américain en Chine).
Cette affaire questionne : l’influence académique de ces donateurs n’empêche-t-elle pas la liberté d’expression ? C’est de cette manière que se défendent les signataires du communiqué.
La question de la liberté d’expression dans les universités américaines
En septembre 2022, est publiée une enquête menée en 2020 par la Foundation for Individual Rights and Expression (FIRE). Cette enquête a permis à l’association de publier son classement annuel des universités américaines en matière de liberté d’expression. Harvard se situe au dernier rang (248e), ce qui illustre bien le reproche fait à l’université depuis des années.
L’idée n’est pas de justifier les propos qu’ont pu tenir certains étudiants mais de se demander si l’influence des donateurs n’est pas problématique. Ainsi, lorsque des personnages influents du monde des affaires expliquent refuser d’embaucher des étudiants à cause de leurs opinions, cela n’est-il pas la preuve que les donateurs utilisent leur influence pour s’assurer que leurs idées restent dominantes ? En effet, le message envoyé par l’université et les donateurs pour les prochaines générations d’étudiants n’est autre que le suivant : s’ils veulent obtenir les meilleurs postes dans les meilleures entreprises, il leur est préférable d’adopter les idées des patrons de ces entreprises.
Agathe Benit
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