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Le patrimoine, une proie idéale en temps de guerre

Les manuscrits de Tombouctou, le temple de Baalshamin, le Palais de Nimroud, ou encore les Bouddhas de Bamiyan, nombreuses ont été les attaques perpétrées contre les grands sites mondiaux du patrimoine au cours des siècles derniers. Si de multiples mesures ont été établies pour pallier ces désastres, le sujet est remis sur le devant de la scène depuis le début du conflit ukrainien.


RETOUR SUR CELLES QUI FIGURENT PARMI LES PLUS GRANDES DESTRUCTIONS DE L’HISTOIRE : LES BOUDDHAS DE BAMIYAN ET LES MANUSCRITS DE TOMBOUCTOU


Près de vingt ans après la destruction des Bouddhas de Bamiyan en Afghanistan par les Talibans, cet acte apparaît encore comme un des pires crimes archéologiques de l’histoire. Le 11 mars 2001, ces deux gigantesques statues posées sur la vallée de Bamiyan sont détruites par les talibans. D’abord frappées par les tirs d’artillerie, ils ont finalement fait exploser les statues, sous prétexte que toute forme humaine était un affront à l’islam.

Alcôve vide qui abritait autrefois un des deux Bouddhas de Bamiyan détruit par les talibans en 2001 en Afghanistan.

© RAHMAT GUL/AP/SIPA, le 17 juin 2009


De même, peu avant la libération de la ville de Tombouctou en 2013, les précieux manuscrits de l'Institut Ahmed-Baba de Tombouctou au Mali sont brûlés par les islamistes. Selon l’UNESCO, la plupart des textes anciens ne se trouvaient pas dans le bâtiment pris pour cible par les islamistes, et ont donc échappé aux flammes. Ces milliers de documents figurant dans les manuscrits de Tombouctou, selon Le Monde, témoignent du « foisonnement intellectuel de l'Afrique précoloniale depuis le XIIe siècle ». C’est dans cette optique que l'historien britannique Dan Snow, après sa visite à Tombouctou, rapporte que « les habitants de Tombouctou disent que s'en prendre à l'histoire et au patrimoine est une attaque contre l'âme d'un pays ».


UNE CONSIDÉRATION GRANDISSANTE DE L’ONU ET DES INSTITUTIONS INTERNATIONALES


En 1954, la Convention pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé est adoptée à La Haye. Elle donne suite aux multiples destructions pendant la Seconde Guerre mondiale, et est pionnière en termes d’instrument de protection du patrimoine culturel.


Quelques années plus tard, c’est au tour de l’ONU de reconsidérer et de condamner la destruction du patrimoine. En effet, depuis 2017, l’ONU considère la destruction de patrimoine comme un crime de guerre. La résolution 2347, portée par la France et l’Italie, est votée à l’unanimité devant le conseil de sécurité des Nations Unies à New York en mars 2017. Irina Bokova, directrice générale de l’Unesco, déclare alors que « la destruction délibérée du patrimoine est un crime de guerre, elle est devenue une tactique de guerre pour mettre à mal les sociétés sur le long terme, dans une stratégie de nettoyage culturel. C’est la raison pour laquelle la défense du patrimoine culturel est bien plus qu’un enjeu culturel, c’est un impératif de sécurité, inséparable de la défense des vies humaines. Les armes ne sont pas suffisantes pour vaincre l’extrémisme violent. Bâtir la paix passe aussi par la culture ; cela passe par l’éducation, la prévention et la transmission du patrimoine. C’est tout le sens de cette résolution historique ». Ces attaques sont perçues comme une atteinte directe à l’homme.


Entre temps, plusieurs résolutions complémentaires sont venues renforcer la condamnation de la destruction du patrimoine. C’est le cas de la résolution 2199. Adoptée en 2015 par une cinquantaine d’Etats, elle interdit quant à elle, le commerce de biens culturels en provenance d’Irak et de Syrie. Elle a permis de renforcer grandement la législation contre le trafic, en démantelant les filières de ce trafic.


LA MISE EN PLACE D’UN RÉSEAU INTERNATIONAL DE « REFUGES »


En 2016, la conférence d’Abu Dhabi rassemblait près de quarante Etats, autour de la question de la protection du patrimoine. C’est à l’issue de celle-ci qu’a été mis en place un réseau international de « refuges », afin de mettre temporairement à l’abri le patrimoine des Etats touchés par le terrorisme et les conflits armés. Jack Lang, chargé à l’époque par la France de l’organisation de cette conférence, explique que « le fonds sera géré à Genève et sera de droit suisse, de manière à assurer une neutralité nécessaire aux yeux des pays, mais aussi des mécènes ».


Aujourd’hui, c’est au tour de l’Ukraine de se voir protéger ses œuvres d’art pendant le conflit qui l’oppose à la puissance russe. Plusieurs collections du Musée national des arts Bohdan et Varvara Khanenko de Kiev ont été déplacées en Suisse. Elles ont été accueillies pour une exposition éphémère au Musée d’art et d’histoire à Genève, du 7 février au 1er mars 2023. Les œuvres exposées illustrent le quotidien de la ville meurtrie par les attaques de guerre, et reflètent la ténacité et l’ambition du peuple ukrainien.


Lola Gautier


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