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Le récit touchant d’une femme, migrante ivoirienne, devenue sans-abri en France


En France, environ 38% des personnes sans domicile fixe seraient des femmes (selon l'Institut national d'études démographiques).


Le vendredi 3 décembre dernier, grâce à l’hospitalité et l’accueil du Samu social de Paris, nous avons pu visiter un centre d’hébergement pour femmes sans-abri au cœur de la capitale, au sein de l’Hôtel de Ville. Une interview auprès de la directrice du centre était programmée et au fil de la discussion, nous nous étions fait à l’idée qu’interviewer une femme hébergée ici serait quelque chose de délicat et compliqué à obtenir. En effet, les femmes, parfois traumatisées par des hommes durant leur passé dans la rue, ont du mal à s’adresser ouvertement et sans méfiance à des personnes inconnues.

Puis, à la fin de l’entrevue, la directrice nous autorise finalement à poser quelques questions à une femme d’une trentaine d’années, bien sûr en lui rappelant que si elle ne souhaite pas répondre à certains moments, elle en a tout à fait le droit.

Pour des raisons de confidentialité, nous appellerons cette femme Sarah tout au long de la retranscription du témoignage.


Le témoignage


Pendant qu’on lui explique le but de notre reportage (connaître le quotidien et le traitement des femmes sans-abri), nous ressentons une femme timide, au regard hésitant mais toujours concentrée sur ce qu’on lui explique. Soudain, une fois notre présentation terminée, elle prend la parole et ne va plus s’arrêter pendant au moins cinq minutes. Cette prise de confiance laisse penser que c’est un besoin pour cette femme de décharger ce fort bagage émotionnel qu’elle a en elle, et de fait, de parler de son passé, son histoire, de la manière dont elle s’est retrouvée ici, de ce qu’elle a vécu depuis qu’elle est en France...


Sarah commence alors son histoire en nous racontant qu’elle n’est arrivée en France seulement depuis la fin du mois de juillet 2021. Elle nous explique qu’elle vient de Côte d’Ivoire et que fuir son pays a été un choix difficile mais obligatoire car sa situation économique était trop difficile là-bas.

Brève sur la façon dont elle a fait le trajet, elle parle ensuite de son arrivée. Elle dit qu’elle ne connaissait personne en arrivant et qu’elle n’avait donc pas d’autres choix de dormir et de vivre dans la rue.


C’est au bout de quelques de jours, qu’une femme vient l’aborder en lui disant que son sort l’attriste et qu’elle serait donc prête à l’héberger. Vivant dans la rue et n’ayant rien, Sarah va se saisir de cette opportunité en acceptant bien évidemment la proposition. Cependant, la femme lui explique qu’elle est prête à l’héberger uniquement la nuit car elle ne peut pas répondre à tout ses besoins (nourriture, lavage...). Sarah nous explique que c’était une femme handicapée, mère de 6 enfants avec peu de moyens.


Suite à cette rencontre, Sarah va continuer à errer dans les rues de Paris la journée et faire de nouvelles rencontres. Très peu de temps après, un homme qui travaille pour Médecins Sans Frontières, va s’arrêter à son niveau dans la rue, préoccupé par son état de santé. Il lui conseille d’aller très rapidement à l’hôpital pour qu’elle soit examinée.

Sarah explique ensuite que la femme qui l’héberge l’a accompagnée une fois à la maison de la solidarité de Saint-Denis afin qu’elle puisse trouver de l’aide et du travail. Une fois là-bas, Sarah va tout faire pour essayer de trouver des offres d’emploi, mais c’est réellement compliqué au vu de la distance qui la séparait entre la maison où elle dormait et Saint-Denis. En plus de cela, la dame qui l’accueillait, jusqu’alors bienveillante, refusait désormais catégoriquement de lui donner quelques euros pour financer ses déplacements journaliers à Saint-Denis.

Et c’est à cet instant que l’on comprend que son histoire prend une ampleur plus triste. Sarah nous raconte que la dame qui l’hébergeait, voyant que Sarah ne trouvait pas de travail et ne se faisait pas d’argent, a commencé à lui demander de faire de plus en plus de tâches ménagères pour sa maison. Sarah a accepté mais s’est vite rendue compte que la dame lui demandait une charge de travail exorbitante, tout cela sans être rémunérée; une situation proche d’une forme d’esclavage moderne en somme.

Sarah, inquiète de la situation, commençait à montrer son mécontentement à la femme. C’est à ce moment là que la dame qui l’hébergeait a voulu se débarrasser d’elle en essayant de l’emmener à un rendez-vous dans un asile psychiatrique, en prétendant que Sarah était folle.

Sarah, voyant la situation s’empirer, a alors immédiatement pris la décision de fuir. De retour à zéro, elle va passer ses jours et nuits dans la rue jusqu’à ce qu’elle fasse une autre rencontre. Un jour, des bénévoles d’une maraude lui proposent de l’emmener dans un hôpital. Une fois là-bas, après des examens de santé pas très encourageants (on lui diagnostique des problèmes au cœur et aux poumons et on lui programme une opération), les soignants vont lui conseiller de se rendre au centre d’hébergement pour femmes sans-abri de l’Hôtel de Ville (celui où nous l’avons rencontrée).

Après son opération en novembre et les deux semaines de repos à l’hôpital Georges Pompidou, elle se rend au centre d’hébergement, où elle bénéficie d’un lit, de douches et de l’accueil rassurant des travailleurs sociaux, qu’elle remercie dans son témoignage. Elle suit en parallèle un traitement médicamenteux lourd mais elle peut compter sur l’aide des employés du Samu social. Elle termine son témoignage en expliquant son envie d’avoir une chambre à elle seule, qui lui procurerait plus d’intimité, en particulier avec ses problèmes de santé.

Tout au long de son histoire, on ressent vraiment dans sa voix et dans sa façon de conter, tout son courage, toute sa volonté, mais aussi la difficulté des choses qu’elle a vécue.


Une situation malheureusement trop récurrente


La chose la plus importante à faire serait de prendre en charge ces femmes directement à leur arrivée en France. Malheureusement, en raison de leur irrégularité administrative et des difficultés à obtenir un travail puis un logement en étant sans papiers, ces parcours se répètent sans cesse, et on assiste à des conséquences dramatiques pour ces femmes migrantes.


La directrice de l’hébergement nous a d’ailleurs confié que les associations qui s’occupent des femmes sans-abris manquaient encore de moyens. Malgré cela, nous soulignons l’aide exceptionnelle qu’elles apportent à ces femmes tout les jours. Ces membres d’institutions et d'associations, qui malgré leurs moyens limités, font un travail exceptionnel et dédient leur vie à se soucier de celle des autres.


En transmettant le témoignage de Sarah, nous avons l’espoir que vous qui lisez, ayez comme nous, l’envie d’aider ces femmes à votre manière dans leurs difficiles parcours.


Thomas. Dagnas et Tristan Lombard






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