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[ Nouvel an chinois ] L’année 4719 du buffle de métal commence !




« Sept jours seulement que le printemps est là; Et déjà deux années que je passe loin des miens; Les oies sauvages partiront avant moi; Je réfléchis - les fleurs n’ont pas éclos ». Ce poème attribué à Xue Daoheng (薛道衡), officier chinois sous la dynastie des Tang 唐朝 (618-907), montre à quel point le Nouvel An chinois est une période importante pour les familles. Souvent, au moment de cette période, littéralement appelée la fête du printemps 春节, on observe de grands mouvements de foules dans les aéroports et les gares chinoises; c’est l’occasion pour celles et ceux partis trouver du travail dans les grandes villes de rentrer dans la maison familiale retrouver parents, grands-parents. Ces voyages familiaux sont souvent décrits comme « la plus grande migration annuelle au monde ».

Depuis plusieurs années, divers événements sont organisés en France pour célébrer le Nouvel An chinois, des rayons remplis de nourriture dite « chinoise » au traditionnel défilé dans le 13e arrondissement de Paris. Après être revenu sur ce qu’est le Nouvel An chinois et quelles sont les coutumes attachées à cette célébration, j’ai recueilli le témoignage d’étudiantes et d’une professeure concernant leur rapport avec le Nouvel An chinois.



Une tradition millénaire aux origines mythiques


Cette fête remonterait à la période antique, liée à la production agricole. Fondé sur le calendrier soli-lunaire, le comptage des jours débute à partir de la première année du règne du mythique Empereur jaune 黄帝, qui aurait régné entre 2698 et 2597 avant Jésus Christ. C’est ainsi que l’année 2021 de notre calendrier grégorien correspond à l’année 4719 du calendrier soli-lunaire. Historiquement, on retrouve les premières traces de l’adoption d’un calendrier soli-lunaire sous la dynastie des Hans de l’ouest, entre 206 B.C et 220 A.C.


Sans rentrer dans la complexité de l’astrologie chinoise, il faut simplement retenir que le calendrier lunaire se fonde sur un cycle de douze années, correspondant à douze branches terrestres 地支, chacune représentée par un animal. Le cycle s’ouvre avec le rat 鼠 (un nouveau cycle a donc été entamé en 2020), puis le buffle/boeuf 牛, le tigre 虎, le lapin 兔, le dragon 龙, le serpent 蛇, le cheval 马, le bélier/la chèvre 羊, le singe 猴, le coq 鸡, le chien 狗 et enfin le cochon 猪. Certains animaux peuvent varier selon les traditions, les régions voire les pays. La Chine, dont les frontières ont évolué au cours des siècles, n’est pas la seule « civilisation » à se fonder sur un calendrier soli-lunaire. C’est ainsi que la Thaïlande, Singapour, Taïwan, la Corée du Sud et d’autres pays asiatiques célèbrent le Nouvel An dit "lunaire". Au Vietnam, celui-ci est par exemple appelée la fête du Têt (Tết Nguyên Ðán). Ce cycle des douze branches terrestres est associé dans l’astrologie chinoise au cycle des cinq éléments : le métal 金, le bois 金, l’eau 水, le feu 火 et la terre 土. Ces éléments sont aussi associés à des couleurs, respectivement le blanc, le vert, le bleu, le rouge et le jaune. L’ensemble forme ainsi ce que l’on appelle le cycle sexagésimal, c’est à dire de soixante années différentes. À cela il faut ajouter le cycle binaire du Yin 阴 et du Yang 阳 : les années impaires sont Yin et les années paires sont Yang. Chaque élément occupe deux années, une sous sa forme Yin et l’autre sous sa forme Yang. Ainsi, l’année 2020 (4718 dans le calendrier soli-lunaire) correspond à l’année du rat de métal yang, l’année 2021 à l’année du buffle/boeuf de métal Yin.

La date du changement de signe se fait entre le 21 janvier et le 20 février du calendrier grégorien.


Les festivités du Nouvel An chinois sont fortement liées à la légende du Nianshou 年獸, un animal maléfique, souvent décrit comme ayant la tête d’un lion et le corps d’un taureau, qui venait terroriser les habitants des villages une fois tous les hivers. Pour se protéger de celui-ci, les villageois ornaient leurs maisons de chiffons rouges et se réunissaient à l’intérieur des foyers pour veiller toute la nuit ensemble. Ils se regroupaient donc autour de mets préparés à l’avance. Lorsque le monstre s’approchait, ils faisaient beaucoup de bruit pour l’éloigner. Par une intervention divine, les humains ont été débarrassés de la visite du Nianshou 年獸,. Cependant, les traditions liées à ce moment unique de l’année se perpétuèrent, donnant lieu aujourd’hui à diverses coutumes.



Des traditions diverses


Le moment fort du Nouvel An chinois 新年, ou fête du printemps 春节, se situe au moment du Réveillon 除夕. Les familles se réunissent traditionnellement la veille du jour de l’an, autour de différents plats. Les traditions culinaires varient selon les provinces et les familles. Généralement, les chinois proposent entre autres des raviolis 饺子, symbolisant la réunion familiale et le bonheur par leur forme de lingots d’or. On trouve également du poisson (yú 鱼), incarnant l’idée que l’on ne manquera de rien. En effet, il existe dans la langue chinoise (mandarin standard 普通话) un mot homophone (馀 yú) signifiant surplus. Des gâteaux spécifiquement liés à cette soirée sont servis, ils sont appelés 年糕 (niángāo).

Céline, étudiante d’origine chinoise en Master 1 de droit public général à Paris II, se souvient de ses Nouvel An passés en Chine où « l’on partage une grande table, on pioche chacun dans différents plats, toute la famille se retrouve au Nouvel An ».


Au moment du Réveillon, les personnes plus âgées donnent des enveloppes rouges

红包 aux enfants, qui contiennent souvent de l’argent en guise de bonne fortune. Avec le temps, cette pratique des enveloppes rouges s’est étendue à d’autres fêtes comme les mariages. Cependant, elles restent très fortement liées aux festivités de la fête du printemps avec des enveloppes rouges qui peuvent même s’envoyer numériquement. Même si plusieurs pays ont adopté des restrictions voire des interdictions en raison du nombre d’incidents, il est courant de faire brûler des feux de Bengale ou d’exploser des pétards au moment du changement d’année, pratiques sûrement liées à la légende du Nianshou.


Évidemment, chaque famille à sa façon de fêter le Nouvel An chinois. Jilina, étudiante d’origine chinoise en Master 1 de droit international public à Paris II, compte passer le Réveillon du Nouvel an chinois en famille. Ses parents « ont préparé un 火锅 (une fondue chinoise), plat dans lequel on met tout ce que l’on aime : des nouilles chinoises, du niángāo, des crevettes, de la viande de mouton, de la viande de bœuf ou encore des champignons». Ce plat se consomme souvent au moment du Nouvel An en France, mais se retrouve moins fréquemment sur les tables des familles en Chine.

Quant à Céline, elle fêtera le Nouvel An le 12 février « en petit comité, avec des amis français, pour leur faire découvrir des plats de la région de ses parents». Elle compte également cuisiner avec eux des raviolis 饺子, tradition représentant pour elle « un moment de partage ». Céline va également partager ces fameux raviolis avec sa famille le 13 février.





De plus en plus de français sans origines chinoises s’intéressent voire fêtent le Nouvel An chinois, par attrait pour la culture ou pour partager un moment de convivialité avec des amis chinois ou d’origine chinoise.

Si Marie-Line, étudiante en licence 1 de chinois à l’Institut National des Langues et Civilisations Orientales, « ne fête pas particulièrement le Nouvel An chinois », « c’est l’occasion d’apprendre plein de choses sur de nouvelles coutumes. Cette après midi [jeudi 11 février ndlr.], j’ai regardé une partie du gala traditionnel du Nouvel An sur CCTV. J’étais émerveillée, c’est hyper enrichissant».

Des festivités pour l’année du buffle de métal bousculées par le contexte de la crise sanitaire


Organiser le Nouvel An chinois, « la plus grande migration annuelle au monde », est un véritable défi pour le gouvernement chinois, en pleine crise sanitaire. C’est parfois la seule occasion pour des familles de se retrouver durant l’année. Les mesures sanitaires mises en place varient d’une région à l’autre. Une grande partie des voyageurs devront se mettre en quarantaine au moment de leur arrivée et de leur départ dans certaines régions. Un test PCR négatif est obligatoire afin de pouvoir embarquer dans un transport à destination de la municipalité de Beijing. Les autorités chinoises ont invité les familles à réduire le nombre de convives autour de la table au moment du Réveillon.

La Pandémie liée à la covid-19 complique aussi l’organisation des festivités pour la diaspora chinoise, dont le nombre s’élève à environ 600 000 chinois en France.

La professeure de chinois à l’Inalco Cao Yanyan trouvait « toujours un petit moment pour rentrer en Chine et fêter le Nouvel An chinois avec les parents». Mais cette année, à cause de la crise sanitaire, elle restera en France.

Marie-Line, quant à elle, « serait allée dans un restaurant avec des amis chinois » si ces derniers n’étaient pas fermés.


Dans tous les cas, si vous croisez quelqu’un fêtant le Nouvel An chinois, n’hésitez pas à lui lancer avec votre plus bel accent « 新年快乐 ! » xīn nián kuàilè ( Bonne année !).


Melchior Delavaquerie

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