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Publico, la librairie libertaire parisienne qui résiste depuis 65 ans

À la fois lieu de rencontre, de pensée et siège du « Monde Libertaire » et de « Radio Libertaire », la librairie Publico a pris place dans le XIe arrondissement parisien en 1959. Un endroit convivial où circulent des idées politiques radicales, qui attire de plus en plus la jeunesse militante.


Librairie publico, 145 rue Amelot, 75011 Paris


À deux pas de la Place de la République se trouve une librairie pas comme les autres. Sur la vieille devanture, une seule inscription sur un fond jaune « librairie libertaire ». Au cœur d’une rue passante, ce lieu offre un choix éditorial exceptionnel, privilégiant les maisons d’édition indépendantes. Livres de vagabond, bouquins de révolutionnaire, ouvrages de critique sociale, tous les champs de pensée de la « gauche radicale » s’y retrouvent. Un haut-lieu de militantisme politique, fief de la Fédération Anarchiste et symbole du courant libertaire parisien.


Un lieu fort en liens et en échanges


La librairie Publico, qui affiche fièrement des tracts anarchistes sur sa vitrine, se situe dans un quartier passant et huppé. Les commerces adjacents sont divers et variés, allant de la boutique d’art-déco branchée aux terrasses proposant des cocktails à des prix exorbitants. 


Vendredi, 14 heures, la boutique est pleine, sent le vieux livre, les clients ne se ressemblent pas et les causeries sont de mise. Quatre militants, tous la cinquantaine passée, échangent et rigolent autour d’un café : « C’est pas fini ce boucan ! » plaisante Mariama Traoré, 60 ans. Militante anarchiste et bénévole, comme l’ensemble des libraires, elle a également son émission sur « Radio Libertaire ». Cette ancienne institutrice vient deux fois par semaine tenir la boutique : « C’est important pour moi d’être ici, on fait des rencontres, on discute avec la jeunesse militante et parfois on s’engueule autour d’un café ». Cette dame forte, originaire de Côte d’Ivoire, accueille les clients avec son grand sourire. Elle connaît tout le monde ici.


Des personnes totalement différentes franchissent le pas de la porte. Entre les vieilles étagères en bois et les murs rouges vagabondent couple quadragénaire, grand-mères en longs manteaux ou étudiants aux cheveux longs. Dans l’arrière boutique, on retrouve une salle profonde au plafond voûté en briques blanches. C’est là que la Fédération Anarchiste organise conférences, débats, concerts, ou présentation de livres.


« De plus en plus de jeunes viennent cultiver leur militantisme »


Les dynamiques de fréquentation de la librairie sont très dépendantes des mouvements sociaux, en raison de sa proximité avec la Place de la République - lieu historique de mobilisation. « On a beaucoup d’habitués, des visages qu’on connaît, mais ces derniers mois aussi de plus en plus de jeunes viennent cultiver leur militantisme » affirme Christophe Alliot, 36 ans, le deuxième libraire présent. Ce grand brun aux cheveux longs, habillé en « communiste mai-68 » selon sa collègue, est là depuis sept ans maintenant. Pour les deux bénévoles, c’est depuis le mouvement contre la loi Travail El-Khomri en 2016 que des jeunes « en plein questionnement politique » viennent fréquenter la boutique. 


« Encore dernièrement, toutes les manifestations pour la Palestine qui arrivent ou partent de République nous offrent un nouveau panel de clientèle » affirme Christophe. Les nombreux livres sur l’histoire du conflit Israélo-Palestinien présents sur une table de camping à l’entrée, témoignent cette envie d’accompagner les mobilisations récentes. Pour Fériel Guveau, 21 ans, venir ici c’est aussi une manière « de faire bloc intellectuellement face à la montée du fascisme en Europe ». Cette jeune femme aux grandes lunettes et à la coupe Afro est devenue sympathisante de la Fédération Anarchiste depuis qu’elle vient ici deux fois par semaine. Comme le symbole d’un renouveau dans un milieu auparavant vieillissant : « il y a de plus en plus de jeunes et de moins en moins de vieux croutons », ironise Mariama. 


Publico comme un lieu convivial où règne une grande fierté d’appartenance politique. Une librairie avec des ouvrages qu’on ne retrouve pas ailleurs. Créée en 1959, elle a su traverser les époques tout en tentant de s’inscrire dans les mouvements sociaux. Elle reste surtout un lieu de rencontre essentiel, un refuge pour des personnes au militantisme politique marginal et pour la jeunesse révolutionnaire.


TRISTAN LOMBARD


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