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Telegram, l'application dans le viseur de Stop fisha



Logo de l’association Stop Fisha qui lutte contre le cybersexisme et les cyberviolences sexistes et sexuelles.


En cette année marquée par plusieurs confinements, la hausse de l'activité sur internet a laissé de la place à de nombreuses formes de malveillances. Laura, cofondatrice de l'association Stop fisha, nous en parle aujourd'hui.


Bonjour Laura, peux-tu te présenter ?


Bonjour, moi c’est Laura, je suis en deuxième année de parcours renforcé Sciences politiques et lettres à Poitiers et je suis un diplôme de management à côté car j'ai le statut national Étudiante-Entrepreneuse.


Je suis surtout militante, je me sens plus militante qu’étudiante en tous cas. Je suis engagée notamment dans Soror, Ecophilia, Buddy System Refugiees et plus récemment avec Stop Fisha que j’ai cofondé et dont je suis actuellement la secrétaire générale. Mon quotidien est vraiment 70% de militantisme et 30% d’études.

Qu'est-ce qu'un compte fisha ?


C'est un compte ou un groupe sur les réseaux sociaux, qui diffuse des contenus intimes de femmes et de filles souvent mineures dans le but de leur nuire. Souvent, il y a aussi des informations personnelles sur la victime. Le terme fisha vient du mot « affiche » en verlan.

Quel est le principe du collectif Stop Fisha ?


Il y a un peu plus d’un an, les comptes de fisha ont explosé. Avant, il y en avait quelques-uns ponctuellement mais ce n’était pas systématique. Avec la hausse d’activité de 70% sur internet au premier confinement, beaucoup de malveillances sont apparues, et c'en est une forme. La majorité de notre champ d’action va être les jeunes femmes qui se font afficher avec leurs informations personnelles. Après on est présents aussi sur les questions LGBT+ (coming-out forcé,...). On s’est donc vraiment spécialisés sur la lutte contre les cyber violences sexistes et sexuelles.


Comment procédez-vous ?


Dans notre premier champ d’action on espionne et on fait supprimer les comptes, cela demande quelques connaissances qu’on a apprises sur le terrain.

Le deuxième champ d’action va être tout ce qui tourne autour de la victime. On va contacter les victimes qu’on retrouve lors de nos veilles sur les comptes fishas et les accompagner de différentes manières. On va les accompagner humainement, juridiquement avec notre avocate, et plus récemment nous avons instauré un lien de confiance avec un numéro de psychologue.

Notre troisième champ d’action principal regroupe tout ce qui concerne la sensibilisation et médiatisation. On fait par exemple des collages, il y a des adeptes dans notre équipe de bénévoles. On est très ouverts aux propositions pour sensibiliser. On fait aussi des interventions scolaires.


Comment l’appli Telegram vous empêche de réaliser vos actions ? Pourquoi est-elle dangereuse ?


Telegram c’est une messagerie cryptée où les utilisateurs sont intraçables. Dessus, il y a du terrorisme, de la pédocriminalité, de la pédopornographie et c’est aussi là-dessus qu’il y a les comptes fisha. Déjà que sur Instagram, Snapchat, Facebook, c’est compliqué d’avoir des contacts haut placés même pour le gouvernement, alors sur Telegram, il n’y a aucun moyen de contrôle.

Dès qu’on parle de Telegram à des politiques, ça n’est pas de leur ressort. Ce n’est pas du ressort de PHAROS non plus, ils n’ont pas de poids, pas de contacts pour faire sauter les comptes.


Qu’appelles-tu de l’espionnage ?


Pour accéder aux comptes fisha, les gens qui affichent vont mettre leurs liens Telegram sur leur compte Instagram ou Snapchat. Il suffit juste de cliquer sur le lien pour entrer dans un autre monde. C’est facile d’y rentrer, on cherche “affiche 82” sur un réseau social, on trouve un compte, on cherche dans ses abonnements et abonnés, on s'abonne, on trouve d’autres liens et on rentre dans les groupes. Une fois sur un groupe, il faut surtout éviter de parler sinon ils nous bannissent du groupe. Cette situation est horrible parce que tu lis des conversations remplies de haine et tu ne peux rien dire.

Le but sur ces groupes est de trouver des informations sur ceux qui affichent. Ils se font de la publicité entre eux, il y a même des rivalités. On met toutes les infos qu’on arrive à avoir sur les agresseurs dans des dossiers qu’on ajoute ensuite à notre dossier de signalement au Parquet de Paris.


Comment s'y prendre pour faire sauter un compte Telegram ?


Il faut le signaler sur l'application. On se donne une date, une heure où on va signaler un compte. Comme on le fait tous en même temps, l’application va recevoir une grosse notification.

Le nombre le plus petit qu’on a été à signaler en simultané devait être vingt. Tout dépend à qui on donne le lien de signalement. On peut faire passer le lien de signalement à nos bénévoles, aux autres associations, etc.

Ça fait plusieurs fois que je lance des appels pour faire des raids de signalement des comptes Telegram sur le compte Instagram de Stop Fisha. Le problème est qu'il y a des taupes qui envoient directement un message au groupe Telegram pour les prévenir et supprimer tous les contenus. Le signalement ne sert donc plus à faire sauter le compte en soi, la seule victoire à ce moment là est que les contenus sont temporairement supprimés du cyberespace public.


Est-ce que tu te sens utile ?


Ça m’apporte quelque chose personnellement. Ça nous laisse quand même des marques au niveau de la violence qu’on voit. On a aussi le syndrome de l’imposteur. On existe depuis 1 an et ça a pris très vite, on est des bébés ! On en est déjà à faire des trucs énormes par rapport à notre expérience temporelle. On travaille avec des asso qui ont 50 ans. On apprend la vie à des adultes, du coup ça nous fait très bizarre. C’est une expérience horriblement géniale, c’est à double tranchant !


Que manque-t-il pour vous développer encore plus ?


On a des personnes qui gèrent très bien tout ce qui est internet mais on manque de quelqu’un de vraiment très spécialisé dans tout ce qui est cyber qui serait présent tout le temps. Ce qui nous manque aussi, c’est aussi au niveau du pôle psychologie, parce qu’on a établi un lien avec un numéro, mais on manque quand même d’un spécialiste de santé.



Saskia Juigner




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