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Un convoi d’agriculteurs à cinq kilomètres de Rungis : « on ira au bout »

Sur l’A6, dans l’Essonne, au niveau de Chilly-Mazarin, un convoi d’agriculteurs se rapproche du marché international de Rungis. Leur route est pour le moment bloquée par les blindés de la Gendarmerie Nationale. 



À 18 kilomètres au sud de Paris, se trouve la commune de Chilly-Mazarin et ses dix-neuf mille habitants. La ville est calme comme à son habitude, à une chose près : le bruit qui provient de l’autoroute A6 raisonne de la mairie à la gare. C’est ici qu’environ 150 tracteurs sont stoppés sur le bitume par un barrage mis en place par les forces de l’ordre. Des médias du monde entier ont les caméras fixées sur le pont qui surplombe ces agriculteurs, en majorité originaires de Seine-et-Marne. « On a pas l’habitude de voir ça ici, mais on est de tout coeur avec eux » explique Martine, retraitée qui réside depuis 30 ans à Chilly-Mazarin. 


« Qui sème la misère récolte la colère » 


La colère gronde dans le monde agricole. En Europe et en France, les agriculteurs mènent des actions de blocage depuis près de deux semaines. Les organisations syndicales réclament entre autres, une meilleure rémunération et une simplification des normes environnementales.

Depuis lundi, l’étau se resserre autour de la capitale avec 8 points de blocages sur les axes autoroutiers. À Chilly-Mazarin, l’objectif est de se rapprocher du Marché International de Rungis, noyau de l’alimentation parisienne. Malgré le face à face avec les blindés mis en opposition sur la voie, l’ambiance est calme et les forces de l’ordre discutent et rigolent avec les manifestants présents. 


Dans l’autre sens, les automobilistes, beaux joueurs malgré les kilomètres de bouchons, multiplient les coups de klaxon et les « tenez bon ! » criés à la volée aux agriculteurs tranquillement installés autour d’un feu et d’une grande tente. Les dizaines de manifestants de la FNSEA, des Jeunes Agriculteurs et de la Coordination rurale semblent motivés et préparés à rester « tant qu’il le faudra » et « tenir le siège de Paris ». « Nous attendons encore beaucoup d’efforts de la part du gouvernement  autour de la concurrence européenne, le libre échange ou encore sur les rémunérations », estime Nathalie Mainguy, productrice de céréales en Dordogne, veste de la FNSEA sur les épaules. 


Bon nombre d’habitants sont là pour apporter leur soutien et des provisions à leurs nouveaux voisins provisoires. William, la cinquantaine, coiffé d’une casquette blanche, comprend leur mobilisation et l’estime plus que légitime : « on est là pour eux, on leur apporte à manger, le gouvernement ne doit pas s’étonner, qui sème la misère récolte la colère ». 

Un gouvernement qui ne trouve pas les maux


Ce mardi 30 janvier, dans son discours de politique générale, Gabriel Attal a annoncé plusieurs mesures pour tenter de répondre à la colère des agriculteurs. Le Premier ministre a appelé à "une exception agricole française" et promis "d'être au rendez-vous" pour répondre à la crise.

« Le gouvernement n’a pas encore réellement compris ce que l’on subit. On n’arrive plus à vivre, on n’a plus le choix, on doit poursuivre la mobilisation » témoigne Nicolas Gibier, céréalier, bonnet sur la tête et les mains proches du feu. Sur les tracteurs sont accrochés et retournés les panneaux des villes dont sont issus les agriculteurs : « Ondreville-sur-Essone »; « Piffonds »; « Fonteneilles »…, cette pratique étant devenue un des symboles du mouvement. 


Pour beaucoup d’exploitants présents, la fin de la mobilisation n’est pas encore en vue. Malgré les cernes et les courbatures, Matthieu Viallain réalise « qu’il n’a plus rien à perdre ». Producteur laitier en Seine-et-Marne, il ne compte plus « les mois où il ne se paye pas ou très peu ». Les revendications sont multiples, mais beaucoup sont conscients que des produits étrangers non-soumis aux normes environnementales françaises les « tuent à petit feu ». 


Face aux annonces du gouvernement non-concluantes et à la fatigue, le mouvement semble vouloir accélérer les actions autour de la capitale. Des agriculteurs sont entrés brièvement à pied sur une zone de stockage du marché de Rungis, mercredi 31 janvier peu avant 18 heures. Le convoi de tracteurs avait été bloqué par les forces de l’ordre en début d'après-midi, mais les manifestants sont descendus de leurs véhicules pour progresser à pied. Certains ont commis des dégradations, selon le préfet de police de Paris Laurent Nunez, qui précise que 79 personnes ont été interpellées.


Le convoi de l’A6, qui était depuis 24 heures à quelques centaines de mètres des blindés de la gendarmerie, a décidé de ne pas rester immobile en se positionnant juste en face. Nathalie Mainguy est plus motivée que jamais et pense que ce n’est que le début : « j’ai tout le temps devant moi, j’ai dis à mes enfants que je partais en vacances ». 


TRISTAN LOMBARD

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