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Un néonazi repenti en quête de spiritualité

William Deligny, 58 ans était une des figures majeures du mouvement skinhead nationaliste dans les années 1980. Aujourd’hui moine hindouiste qui prône la non-violence, il tente de guider les jeunes militants radicaux vers le même chemin que lui. 



Place Saint-Michel, la nuit tombe, les touristes sont nombreux mais tout est calme. Le quartier ne ressemble plus à celui que William Deligny a connu dans les années 1980. C’est ici que son « gang » faisait loi face aux autres bandes de skins parisiens. Lui aussi, il a radicalement changé. Les marques de son passé sont là : les nombreux tatouages et le style biker. Mais l’apparence entre en contradiction avec ce qu’il est devenu, un moine vaishnaviste - courant de l’hindouisme. Le sourire doux, la parole enveloppante, bonnet et blouson estampillés « Ahimsa non-violence », William Deligny a un parcours plus qu’atypique, presque invraisemblable.


« Une enfance aveuglée par la haine »


William grandit dans un petit appartement en HLM dans la banlieue-est parisienne, à Bagnolet avec une mère affective et un père alcoolique. Très jeune, il côtoie de près la violence : les bagarres au collège, les premiers vols de voiture.


Pour lui éviter un avenir délinquant, sa mère le change d’établissement, événement marquant dans son basculement. Au début des années 1980 les bandes de skins se regroupent principalement autour de la rue d’Assas, c’est ici que William rejoint son nouveau collège. Ce jeune adolescent, « déjà aveuglé par la haine » est fasciné par ce qu’imposent ces géants au look rock et au crâne rasé. Il commence à les observer, à imiter leur démarche, écouter la même musique, adopter leur style et frapper comme eux. 


À 14 ans, il entre dans un gang skin, « la bande de Tolbiac » l’une des plus radicalisées à droite. Ainsi, sa haine se politise, elle s’oppose aux fréquentations communistes de son père. Il rejoint le noyau dur du gang, notamment mené par Serge Ayoub, figure majeure du mouvement skin néonazi français, qui se déplacera par la suite à Saint Michel. À cette époque, « P’tit Willy » est l’un des skins les plus respectés de Paris : « dès que je croisais un regard je devenais un monstre ». Sa vie oscille alors entre drogues, affrontements au couteau et hooliganisme. Entre deux rixes, il fonde avec des amis skinhead le groupe de rock néonazi Evil Skins, qui le pousse d’autant plus dans l’admiration d’Hitler.


Le début d’une deuxième vie


William trouve, petit à petit son médicament, la spiritualité, afin de soigner sa haine intérieure. Plusieurs faits consécutifs l’amènent à remettre en question les idéologies qui l’animent et « qu’il ne comprend même pas ». Son meilleur ami prend une balle, un autre décède, « c’est une période où beaucoup de skins quittent le mouvement ». Il se rend compte du mal qu’il fait, du regard apeuré de sa voisine juive, des gens qui s’écartent sur son chemin. Il perd au fur et à mesure cette haine qui l’aveuglait, ce haïssement de tous et de lui-même. C’est ici que débute sa nouvelle vie. 


Il rêve d’une congrégation libre, à mille lieues des retraites sectaires où gravitent gourous et illuminés rencontrés pendant ses années de formation spirituelle. En 2003, il parvient à ouvrir un temple vaishnaviste dans l’agglomération de Rouen. C’est là qu’il réside dorénavant. Il raconte partout comment il a troqué son blouson noir de skinhead contre l’habit couleur safran de moine.


« Après avoir été au fond de la haine j’ai envie d’atteindre le fond de l’amour ». Ses anciens compagnons de gang ne voient pas tous d’un bon œil cette rédemption. Serge Ayoub alias « batskin », encore très actif dans les milieux d’ultra-droite, ne comprend pas ce besoin de se racheter d’un passé qu’il qualifie lui de « glorieux ». William Deligny tente aujourd’hui d’ouvrir la voie à des jeunes qui baignent dans la violence qu’il a connue, beaucoup le contactent. Sans jugement, il tente de les faire décrocher de leur addiction idéologique violente : « Je paye ma dette ».


Tristan Lombard

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