Au centre de la vie culturelle américaine, l’artiste pop s'apprête-t-elle désormais à jouer un rôle majeur dans la vie politique du pays ? Républicains et démocrates se crêpent le chignon sur le cas de la chanteuse en attendant une prise de position de sa part.
Un sondage avant-coureur publié dans la presse américaine
À la suite des premières rumeurs d’intervention de Taylor Swift dans le déroulé de la campagne présidentielle, le magazine américain Newsweek mène une enquête qu’il publie fin janvier. Le résultat est sans appel : sur les personnes interrogées, 18% des électeurs indiquent qu’ils seraient « plus susceptibles de voter pour un candidat soutenu par la chanteuse » originaire de Pennsylvanie.
Dans la sphère médiatique, le moindre de ses mouvements est scruté en détail et partagé des milliers de fois. Nommée « Person of the Year 2023 » par le célèbre Time Magazine, celui-ci n’avait pourtant pas prévu dans son portrait la majeure influence qu’elle pourrait s’apprêter à jouer dans le remake du duel tant attendu Trump-Biden.
Taylor Swift, un engagement politique porté vers le camp démocrate
Lors du National Voter Registration Day, en septembre dernier, la chanteuse publie un message sur ses réseaux sociaux pour motiver ses fans à rejoindre les listes électorales : « J'ai eu tant de chance de vous voir si nombreux à mes shows (...) Je vous y ai entendus élever vos voix. Soyez prêts à les faire résonner lors de l'élection de cette année ! »
Véritable explosion sur le site Vote.org qui répertorie le nombre d’inscriptions. En l’espace de quelques heures seulement, la plateforme enregistre plus de « 35.000 inscriptions, un bond de 115% dans les inscriptions d'électeurs de 18 ans par rapport à 2022 », selon la PDG de l’entreprise Andrea Hailey.
Plus qu’un simple appel à s’inscrire sur les listes, le positionnement politique de la star, autrice de « Bad Blood » est connu depuis quelques années. Dans l'État du Tennessee, où elle a grandi, elle annonce son soutien à deux candidats démocrates lors des élections Midterm de Novembre 2018. Rebelote à l'échelle nationale en 2020, lorsqu’à quelques semaines du vote, elle attaque frontalement Donald Trump, responsable d’avoir « attisé le feu de la suprématie blanche et du racisme ». Et appelle clairement les Américains à déposer un bulletin Biden dans l’urne.
Un “complot médiatico-politique” selon des membres influents du camp Trump
Le 29 janvier dernier, l’ancien candidat à la primaire républicaine Vivek Ramaswamy, qui a désormais rejoint le camp Trump déclare dans un post sur X : “Je me demande qui va gagner le Super Bowl le mois prochain. Et je me demande si l’on aura le droit cet automne à un majeur soutien présidentiel de la part d’un couple artificiellement créé”. Par ce post vague, l’entrepreneur indo-américain fait référence au conjoint de Taylor Swift. Depuis septembre 2023, l’artiste américaine partage sa vie avec Travis Kelce, joueur de football américain, star des Kansas City Chiefs. L’équipe vient juste de se qualifier pour le Super Bowl, finale du championnat NFL aux Etats-Unis, qui aura lieu le 11 février à Las Vegas.
L’évènement, l’un des plus visionnés à travers le pays et le monde (113 millions de téléspectateurs pour l'édition 2023) serait donc selon Ramaswamy la vitrine parfaite pour que les démocrates exposent leurs idées via l’audience que peut mobiliser une telle superstar. D’autant plus que sa présence dans les tribunes du stade des Chiefs a un réel impact sur l’économie de la ligue de football américaine. Selon Front Office Sports, la coqueluche des jeunes américaines aurait rapporté plus de 331 millions de dollars d’exposition publicitaire à la NFL.
En dessous du post du pro-Trump, les théories les plus folles se bousculent : Taylor Swift serait un agent secret du Pentagone, ou encore contrôlée par le financier Georges Soros…
Alors que Taylor Swift ne s’est toujours pas prononcée sur un possible soutien, selon les conservateurs, tout serait déjà écrit et manigancé pour que le camp libéral ait l’appui d’une des plus grandes armes médiatiques du pays à quelques mois de l'élection.
Coup de pouce vital pour les chances de victoire de Joe Biden ?
Le 46e Président des Etats-Unis traverse une passe très compliquée. Seul candidat crédible du parti démocrate, il patine, voire recule dans les sondages. Ce 4 février, NBC News publiait un nouveau constat criant. Joe Biden récolterait 42% d’intention de votes, tandis que le magnat de l’immobilier Trump serait lui crédité de 47% des voix exprimées.
Médiatiquement, Joe Biden souffre d’une image difficile à porter. Son âge, 81 ans, est peut-être ce qui lui porte le plus défaut. Il accumule semaine après semaine les bourdes lors de déplacements officiels. Il confond par exemple le président mexicain et égyptien, appelle Macron “Mitterrand”.
Sur le plan communicationnel, ses proches tentent de rassurer sur sa capacité à remballer pour 4 ans de plus mais l’impact semble restreint. On s’agite alors en coulisses pour obtenir ce soutien de poids qu’est Taylor Swift. Le gouverneur démocrate de Californie Gavin Newsom encense la chanteuse au micro de TMZ, expliquant qu’elle “a un pouvoir unique dans l'élection présidentielle”.
Malgré la grandeur ridicule de l’audience que la reine des « Swifties » (le surnom de sa “fanbase”) peut soulever, l’impact réel sur l’élection présidentielle de novembre reste néanmoins à démontrer. En effet, selon une enquête Statista publiée en décembre 2023, la démographie de ses fans s’articule autour de marqueurs déjà grandement acquis à la cause démocrate : âgés de 18 à 24 ans, principalement des femmes, blanches.
Celle qui déclame : « cela doit être épuisant de toujours supporter l’anti-héros » dans son tube « Anti-Hero » fera t-elle le choix de soutenir l’anti-héros des sondages ? Réponse dans les prochaines semaines ou les prochains mois.
Thomas Dagnas